La bénédiction des couples homosexuels est un conflit à basse intensité. Après le soulèvement de nombreux épiscopats, c'est maintenant au tour des théologiens. En fait, malgré les assurances du Vatican et la publication d'un deuxième document, les aspects problématiques de la déclaration Fiducia Supplicans sur la façon de bénir les couples homosexuels ne cessent de susciter des inquiétudes, des prises de distance, des refus. Il est désormais clair que l'opposition ne peut plus être considérée comme des attaques indiscriminées contre le pontificat, comme si elle faisait partie d'un complot de la frange la plus conservatrice de l'Église à travers les blogs catholiques qui ont proliféré ces dernières années en protestation, souvent de manière anonyme dans de nombreuses langues (anglais, français, italien, espagnol, allemand).
L'un des théologiens les plus respectés, consultant de plusieurs dicastères de la curie, enseignant à l'université pontificale et auteur de plusieurs publications, le français François Marie Lethel a élaboré un essai sur le document papal dans lequel - en tant qu'éminent spécialiste de Sainte Thérèse de Lisieux, Docteur de la Miséricorde - il a voulu souligner que même la citation faite par le cardinal Victor Fernandez sur la grande sainte française dans le texte pour justifier la bénédiction des couples homosexuels n'est pas pertinente car elle induit - aussi celle-là - à confondre les fidèles sur la doctrine traditionnelle du mariage entre un homme et une femme.
Lethel écrit que les couples de même sexe ne peuvent être comparés à ceux hétérosexuels, car ils sont « contre nature et en un certain sens une structure de péché. Un couple irrégulier entre un homme et une femme pourrait être régularisé par la suite, par exemple après la mort des conjoints légitimes. Ainsi, Dieu n'a pas béni le couple adultère de David et Bethsabée, épouse d'Urie. Au contraire, il les a sévèrement punis et leur fils est mort. Puis David s'est repenti et de leur union est né légitimement Salomon (cf. Mt 1,6) ».
L'Église, ajoute-t-il, « ne peut bénir que ce que Dieu bénit, toujours en se soumettant à sa Parole. Or, le seul couple que Dieu bénit est l'homme et la femme qu'il a créés à son image et à sa ressemblance (cf. Gen 1,27-28), appelés par lui à devenir « une seule chair » dans le mariage (cf. 2,24). D'un point de vue biblique, il n'y a aucune justification à bénir un couple de même sexe. Si Dieu ne bénit pas un tel couple, comment l'Église pourrait-elle le bénir, même avec une bénédiction spontanée ? »
Le théologien français, en tant que consultant du Dicastère pour les Causes des Saints, après avoir étudié plusieurs cas de sainteté dans le mariage, en contemplant la sainteté de chacun des conjoints, est arrivé à la conclusion que « la sainteté commune n'est pas possible pour un couple de même sexe, car ce n'est pas Dieu qui les a unis. Mais il reste vrai que chaque personne est appelée à la sainteté et doit être bénie ».
Alors que faire ? Les homosexuels devraient être bénis séparément, pas en tant que couple. « Dans la bénédiction, nous devons en quelque sorte séparer ce que Dieu n'a pas uni ! Nous devons développer une véritable pastorale de la sainteté pour les personnes homosexuelles. Nous devons réévaluer la chasteté qui est requise pour tous, dans tous les différents états de vie ».
Le théologien rejoint la décision de l'ensemble de l'épiscopat français : « C'est pourquoi il est approprié de bénir de manière spontanée, individuellement, chacune des personnes qui forment un couple, quel que soit leur orientation sexuelle, qui demandent la bénédiction de Dieu avec humilité et avec le désir de se conformer de plus en plus à sa sainte volonté ». Mais pas le couple homosexuel, comme le suggère de faire la Fiducia Supplicans publiée le 18 décembre.
Quant à Sainte Thérèse, citée à tort et de manière superficielle par le Préfet du Dicastère de la Foi, Lethel ajoute que Saint Paul souligne l'aspect essentiel du péché « contre nature », qui sera constamment réaffirmé par l'Église. « Condamnée sévèrement dans l'Ancien Testament, la pratique de l'homosexualité était considérée comme normale dans le monde grec, comme elle l'est aujourd'hui dans notre monde européen et nord-américain », mais « Thérèse a merveilleusement compris la pensée de Saint Paul concernant la Miséricorde et la Justice de Dieu pleinement révélées en Jésus-Christ. L'effet propre de la Justice de Dieu n'est pas de juger, mais de justifier gratuitement l'homme pécheur dans le sang de Jésus ».
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